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Les zones humides de la Réserve naturelle nationale (RNN) de la Grande Sassière sous haute surveillance

Flore

Des milieux froids et humides rares, à protéger

Des zones humides héritées des glaciations, rarissimes dans les Alpes.
Sources, marais, tourbières… Parmi les différents types de zones humides en Vanoise, il en est une qui retient tout particulièrement l’attention : les bas-marais arctico-alpins des alluvions calcaires, à laîche à deux couleurs, bien représentés dans la Réserve naturelle nationale de la Grande Sassière.

Un joyau qui fleure bon l’exotisme nordique

Cette dénomination un peu compliquée désigne des zones humides localisées au-dessus de 2 000 m d’altitude, installées principalement en bordure des torrents qui s’écoulent des glaciers ; la végétation relativement clairsemée de ces milieux se compose de petites plantes aux fleurs discrètes héritées de la dernière grande glaciation. Parmi elles, au moins huit espèces sont caractéristiques* de ces marais ; toutes sont protégées par la loi française. Le nom de certaines - jonc arctique, tofieldie boréale… - témoignent de leurs origines glaciaires.

La préservation de ces zones humides est un enjeu prioritaire à l’échelle de l’Union européenne, en application de la Directive « habitats faune-flore » et dans le cadre du réseau « Natura 2000 » https://www.observatoire.savoie.equipement-agriculture.gouv.fr/Atlas/n2000.php

 

La RNN de la Grande Sassière, paradis des bas marais arctico-alpins

Le vallon de la Grande Sassière à Tignes est protégé par une Réserve naturelle nationale depuis 1973. L’État en a confié la gestion au Parc national de la Vanoise. Sont installés dans ce vallon des bas-marais arctico-alpins parmi les plus représentatifs des Alpes. Il est notamment possible d’y observer les huit espèces caractéristiques.

Le plan de gestion de la Réserve, qui recense les patrimoines et planifie les actions à entreprendre pour les préserver, a bien identifié l’enjeu exceptionnel que représente la conservation de ce type de milieux.

Dans un contexte de dérèglement climatique, la pérennité de relictes glaciaires présentes dans les zones humides est un défi à relever. Pour évaluer « l’état de santé » et suivre l’évolution de ces marais, le Parc national a mis en place des suivis de la flore depuis 2007.

 

Des suivis pour mieux connaître l’évolution de la flore des bas-marais

Deux sites colonisés par ces bas-marais arctico-alpins – Derrière le Santel et aux Grands Creux – font l’objet d’un suivi.

Derrière le Santel, une vaste zone alluvionnaire, située à 2500 m d’altitude, est subdivisée en carrés de 25 m de côté. Sur une quarantaine de carrés sont systématiquement recensées la présence et l’absence des huit espèces caractéristiques.

Sur Les Grands Creux, ces zones humides sont présentes sur des pentes le long d’écoulements ; les placettes suivies selon le même principe ont une surface d’1 m² subdivisée en petits carrés de 10 cm de côté (présence ou absence des espèces caractéristiques).

Entre 2007 et 2020, les relevés ont été reproduits à six reprises. Les données accumulées permettent une analyse statistique fiable de l’évolution de la présence de ces espèces caractéristiques.

 

D'assez bons résultats à confirmer

Derrière le Santel, toutes les espèces suivies ne montrent pas d’évolution temporelle significative ; nous en concluons temporairement que « l’état de santé » de ce bas-marais demeure bon.

La situation est plus contrastée sur Les Grands Creux où l'une des espèces suivies montre une baisse significative de sa présence, tandis que deux autres espèces montrent une hausse significative. Avec le recul, les surfaces échantillonnées aux Grands Creux, d’un mètre carré, sont peut-être trop petites pour percevoir l’évolution des populations de ces plantes pionnières qui peuvent fluctuer sur une petite surface mais rester globalement stable à l’échelle du marais étudié. 

À l’issue du plan de gestion actuel de la réserve, en 2023, les protocoles de suivi pourront être modifiés si besoin.

Ces observations et toutes les autres collectées sur la flore, la faune, la fonge, continuent d’enrichir les connaissances sur les patrimoines de la Réserve naturelle de la Grande Sassière. Elles ne contribueront certes pas à ralentir le dérèglement climatique mais elles documentent ses effets sur la biodiversité, particulièrement fragile en haute montagne.

* Jonc arctique, Laîche à petite arête, Laîche bipartite, Laîche bicolore, Laîche brun-noirâtre, Laîche maritime, Tofieldie boréale, Trichophore nain